1929, Vivre double donc son rythme de
publication (24 numéros au lieu de 12), et influence
considérablement le débat public, notamment avec la mise sur le
tapis de la question de la nudité, qui suscitera bien des
polémiques, et fera même interdire la revue dans les kiosques
parisiens...
-La grande hypocrisie :
Cette interdiction (prévue par Kienné
de Mongeot et ses collaborateurs) mettra en lumière (mais en
était-il besoin?) la grande hypocrisie qui règne sur le « monde » :
on supporte fort-bien le déshabillé – surtout quand il rapporte-
, mais la nudité simple et franche, elle, ulcère et affole.
Et pour cause : le retour à une
santé holistique et naturelle par l'hygiénisme proposé par le
Naturisme Intégral de toute la population mettrait bien à mal
nombre d'intérêts financiers...
Alors autant, sans le Nu pour attirer
l'attention des libidos asséchées, les préceptes naturistes sont
inaudibles et ne dérangent donc personne... autant avec, la
notoriété de l'hygiénisme devient « dangereuse »...
(et ne rigolez pas : c'est toujours le cas aujourd'hui!)
-Naturisme Intégral et
Christianisme :
En ces temps où la pensée religieuse
dominait encore la mojorité des esprits, nombre de plumes s'en
prendront à la « doctrine » de Vivre, l'accusant
d'être d'essence maçonnique et anti-chrétienne, visant à
pervertir l'humanité entière en l'encourageant à sombrer dans la
bestialité la plus libidineuse...
Bien entendu, ces accusateurs n'ont pas
lu ni étudié l'objet de leurs attaques, car au contraire de vouloir
détruire le christianisme, les rédacteurs et ligueurs de Vivre,
en grande majorité catholiques et protestants, soutiendront dans le
Naturisme Intégral les préceptes parfaitement chrétiens, et
affirmeront même que le Naturisme Intégral est une voie fidèle à
l'enseignement de Jésus (théologie de la libération avant la
lettre !)*, libérant les corps, les âmes et les esprits de leurs
distorsions morbides...
En revanche, si le Naturisme combat
bien une chose, ce n'est pas le christianisme en lui-même, mais le
dualisme qui l'a infecté (exécration du corps et de "la
chair", abomination de ses fonctions les plus nobles sans qui la
vie n'existerait pas !), représenté par les ligues puritaines et
janssénistes qui, névrosées elle-mêmes, propagent des conceptions
pathogènes qui rendent le monde malade tant sur le plan
physiologique que sur le plan psychique... (nous aurons à y revenir
prochainement)
-Nudisme et Éducation Sexuelle :
Si le nudisme est aussi important dans
le Naturisme Intégral, c'est qu'il participe pleinement à
l'éducation sexuelle, éternelle victime du tabou puritain (tenant
d'un dévoiement idéologique de la démarche "spirituelle"
et non de la raison), et qui est enfin abordée cette année dans le
programme de régénérescence de Vivre.
Le Dr Pierre Vachet affirme et démontre
que le tabou corporel et l'omniprésence des vêtements
« cache-sexes » créent chez les individus un complexe
qu'il nommera « inquiétude sexuelle » (curiosité
exacerbée et obsédante, qui peut se teinter d'un profond mépris
pour le sexe, et l'autre sexe notamment), et qui ne serait pas
anodine si elle n'était pas la cause directe de nombreux troubles
psychologiques, conduisant jusqu'aux crimes que sont le viol et le
meurtre passionel. Au contraire, la simple nudité, si elle est
nécessaire physiologiquement, l'est tout autant socialement, car
elle apaise l'individu en dissolvant purement et simplement cette
"inquiétude" corrosive et angoissante, ce faux "mystère"
autour duquel tout le monde phantasme et élabore ses interprétations
dénaturées.Car en donnant à voir le corps dans sa réalité
intégrale, la nudité contribue à en intégrer dans la normalité
et tout naturellement ses dimensions sensuelles et érotiques qui ne
s'expriment pas "nécessairement" en "actes"
sexuels !
La preuve en est encore donnée par
l'exemple des peuplades nues, ou les mœurs sont bien plus simples,
saines et franches que chez leurs sœurs (récemment) habillées, ces
dernière découvrant par le biais des vêtements tous les travers
obsessionnels et diabolisants de notre « glorieuse »
civilisation...
-Alimentation et « sexualité » :
Mais encore une fois, tous les
collaborateurs de la revue l'affirment, le répètent
inlassablement : la nudité seule ne peut être une panacée, et
elle doit s'accompagner d'une hygiène générale : il est
énormément question d'alimentation saine dans la revue, avec un
idéal frugivore marqué, bien que difficilement accessible pour
tous, du moins du jour au lendemain.
Et si les auteurs insistent autant sur
ce sujet, ce n'est pas seulement pour le bon fonctionnement de
l'organisme, mais aussi parce que le mode d'alimentation a un effet
direct sur notre manière de vivre, de penser, de ressentir... et
donc également sur notre « instinct génésique » :
nombre de nos aliments et leurs condiments sont reconnus pour être
aphrodisiaques... or, comment retrouver la paix des sens et de
l'esprit si l'excitation sensorielle (et,de fil en aiguille
"sexuelle") se trouve constamment émoustillée par
l'absorbtion d'aliments "échauffants" ?
-Alors en conclusion,
nous rappellerons simplement, à la
suite de l'esprit de Vivre, que tout en nous se tient, et que
rien ne doit être écarté de notre compréhension de nous-même si
l'on veut retrouver notre équilibre interne, notre épanouissement
et notre plénitude de vivre...
*
D'ailleurs, le message de Jésus dans un monde baignant dans la
pensée judaïque sclérosée n'était-il pas lui aussi un appel au
retour au bon-sens et à la simplicité revitalisante de la Nature ?
Bonne lecture !